Il ne sert de rien à l'homme de gagner la Lune s'il vient à perdre la Terre.
Citation extraite du "Dernier bloc-notes, 1968-1970" de François Mauriac, page du lundi 21 juillet 1969.
Extrait du "Dernier bloc-notes, 1968-1970" de François Mauriac, page du lundi 21 juillet 1969:
Tous les miens ont passé la nuit devant l'écran de la télévision. Je me contente ce matin de la radio, admirant certes ce pouvoir illimité qui a été donné aux hommes, mais songeant qu'il ne sert de rien à l'homme de gagner la Lune s'il vient à perdre la Terre. Or, il la perd. Comme le Rhin empoisonné, ses milliers de poissons le ventre en l'air n'ont- ils guère ému que les peuples riverains? Quel rapport avec la conquête de la Lune? C'est la même exigence aveugle que rien n'arrête dans aucun ordre et quoi qu'il en doive coûter...
|Il ne sert de rien à l'homme de gagner la Lune s'il vient à perdre la Terre.|
Sans doute faut-il incriminer d’abord les institutions qui, d’avance, détruisent les chefs. Nul régime n’aura, autant que le nôtre, usé d’individus plus rapidement.
Citation extraite de "L'homme qui ne vient pas", texte de François Mauriac écrit en juillet 1933.
Extrait de "L'homme qui ne vient pas", texte de François Mauriac écrit en juillet 1933:
Alors qu'en Allemagne, en Italie, la jeunesse mène le jeu, pourquoi demeure-t-elle, chez nous, éloignée du pouvoir? Mais c'est mal poser la question. Les jeunes Allemands et les jeunes Italiens n'ont rien fait que de subir la volonté d'un homme. Ils n'ont rien pris, ils se sont laissé prendre. Quelqu'un les a asservis qu'ils ont chargé de penser et de vouloir pour eux.
Qu'est-ce donc, en France, qui empêche l'homme de venir - l'individu habile à utiliser la misère d'une génération, la faim des corps de vingt ans, la rancune des cœurs, le désespoir?
Sans doute, faut-il incriminer d'abord les institutions qui, d'avance, détruisent les chefs. Nul régime n'aura, autant que le nôtre, usé d'individus ni plus rapidement. C'est pitié que de les voir au sortir du toril des grandes écoles, ces majors de promotion, ces «caciques» éblouissants d'intelligence, bâtis en force, touche-à-tout, beaux parleurs, débarrassés de toute métaphysique. «Garçons français, les plus intelligents de tous», chantait dans ma jeunesse Henri Franck. Aucun autre pays n'a de telles promesses, et, au début de chaque génération, de tels chefs en herbe.
Mais dès leurs premiers pas, la grande tentation les guette, le Parlement les happe. C'est se séparer, pour eux, et d'un seul coup, des forces vierges du pays.
|Sans doute faut-il incriminer d’abord les institutions qui, d’avance, détruisent les chefs. Nul régime n’aura, autant que le nôtre, usé d’individus plus rapidement.|