En théorie, la politesse englobe, voire commence par la morale, mais en pratique, elle est tout autant une question d'acquisitions matérielles et de manières urbaines.
Extrait de "A Polite and Commercial People: England 1727 - 1783" de Paul Langford (1989):
En un sens, la politesse était une conséquence logique du commerce. Une société féodale et une économie agraire étaient associées à un code d'honneur élaboré destiné à régir les relations entre quelques privilégiés. Leurs inférieurs pouvaient en toute sécurité être laissés à leur ignorance brutale sous des lois brutales. Mais une société dont l'élément le plus vigoureux et le plus important était une classe moyenne commerciale, impliquée à la fois dans la production et la consommation, nécessitait un moyen plus sophistiqué de réglementer les manières. La politesse transmettait la gentillesse, les connaissances et la sociabilité de la classe supérieure à une élite beaucoup plus large dont la seule qualité était l'argent, mais qui était heureuse de le dépenser pour acquérir le statut de gentleman. En théorie, la politesse englobe, voire commence par la morale, mais en pratique, elle est tout autant une question d'acquisitions matérielles et de manières urbaines. Elle permettait et contrôlait une concurrence relativement ouverte pour le pouvoir, l'influence, les emplois, les épouses et les marchés. Bien qu'elle ait suscité beaucoup d'émulation et d'admiration pour les aristocrates, elle n'impliquait pas une société essentiellement aristocratique. La Grande-Bretagne du XVIIIe siècle était une ploutocratie, s'il en est, et même une ploutocratie dans laquelle le pouvoir était largement diffusé, constamment contesté et en constante adaptation aux nouvelles incursions de la richesse, souvent modeste.